Somewhere…la mancha par Irina Brook, c’est aux Bouffes du Nord !
De l’œuvre monument de Miguel de Cervantès à la création originale d’Irina Brook et Marie-Paule Ramo, le temps a coulé et l’humanisme reste. Don Quichotte, c’est ce personnage éponyme majeur de l’histoire de la littérature qui devenu adjectif, a gagné la culture commune occidentale à la beauté de sa cause. Et c’est là qu’on se dit qu’Irina Brook a su dans sa lecture théâtrale et contemporaine du personnage et de sa quête, porter à la scène la fulgurante humanité de cette œuvre en en faisant un bijoux de spectacle au carrefour des arts vivants, profondément juste puisqu’accessible à tous et toutes.
Pas de rideau aux Bouffes du Nord et l’on pourrait presque croire en y entrant, à voir ces deux clochards vivotant sur scène et impassibles devant le tumulte occasionné par le placement des spectateurs, que l’on s’est trompé et que c’est à l’attente de Godo que l’on va se confronter. Et pourtant, c’est bien à Don Quichotte de la mancha et à son fidèle Sancho Panza auxquels nous avons d’ores et déjà à faire, sauf qu’avec Irina Brook, ces deux là sont devenus d’intrigants clodos qui vont tenter le rêve américain mais à la manière de Cervantès. Comme Don Quichotte et Sancho, ils s’épuisent en désillusions jusqu’à retrouver leur situation initiale sans même avoir pu répandre leur volonté de noblesse le long de la fameuse 66. Irina Brook a donc osé un no man’s land par lequel l’œuvre de Cervantès parvient , et ce au moyen d’un détour inspiré aux accents de road-movie américain.
Le mélange est culotté, le résultant épatant ! Il faut dire que l’énergie vitale dégagée par l’ensemble des interprètes de Somewere…la mancha est peu commune. Toute la troupe agit en folie dans une théâtralité exacerbée qui se déploie sans peur du ridicule et pour un comique de tous les degrés. Au rythme cadencé de saynètes où les performances théâtrale rencontrent tantôt la danse, tantôt le chant, tantôt l’esprit de cabaret, l’histoire s’étoffe et la quête progresse. Gérald Papasian, alias Sancho Panza se démarque néanmoins du collectif par une prestation d’une finesse indiscutable et son personnage attache autant qu’il émeut. Un bémol en revanche sur le jeu un poil trop plaintif de Don Quichotte qui fatigue et apporte quelques longueurs regrettables, mais l’on se demande si ce n’est pas la résultante inévitable d’un déséquilibre entre sa triste figure et l’impeccable présence de son fidèle serviteur.
Somewhere…la mancha est un spectacle qui fait du bien, et qui rappelle que la vie prend sens dans la poursuite inextinguible d’illusions sans cesse mourantes et sans cesse renouvelées. Voilà un spectacle tout public qui sait susciter rires et larmes à mesure qu’il nous ramène en modernité à l’universalité de Don Quichotte.
Christine Sanchez
Six acteurs dont une danseuse de flamenco et un accordéoniste acrobate
Du mardi 14 avril au samedi 9 mai à 21 h
Représentation supplémentaire samedi à 15h30 à partir du 25 avril, relâche dimanche et lundi
Durée : 1h45
Renseignements et réservations : 01 46 07 34 50
Tarifs : de 12 à 26 euros
Théâtre des Bouffes du Nord
37 bis, boulevard de la Chapelle
Paris 10ème – Métro La Chapelle
En tournée…
Festival d’Almagro (Espagne) : les 3 et 4 juillet
Festival de Figeac : le 1er Août
Le Seynod (Haute-Savoie) : le 15 octobre
Balbec (Seine-Maritime) : le 7 novembre
Articles liés
La Nouvelle Seine présente Dena Vahdani dans son spectacle ” Dena – Princesse Guerrière”
Un pied à Bruxelles, un pied en Flandre et le cœur en Iran. Dena, c’est 100.000 watts d’énergie positive ! D’origine iranienne, cette jeune femme navigue entre deux cultures, entre Orient et Occident, avec énormément d’humour, d’autodérision, de tendresse...
Charlotte Desloins dans “Salle d’attente” à la Nouvelle Seine
Salle D’attente est un seule en scène en 5 actes où chaque acte représente une séance chez un thérapeute et où on suit l’évolution de la dépression du personnage. Sur scène, Charlotte raconte avec humour ce qui nous émeut....
“Quand je serai grande, je serai Patrick Swayze” le premier seule-en scène de Chloé Oliveres
Après avoir confondé la compagnie des Filles de Simone, Chloé Oliveres, époustouflante de présence et de bagout, se lance dans son premier seule-en scène. Elle s’empare du plateau et y rejoue ses amours réelles et imaginaires, avec beaucoup d’autodérision, le...